Végétalisation des villes

When biodiversity must go hand in hand with building



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Le terme est sur toutes les lèvres et pourtant beaucoup de limites sont encore existantes aujourd’hui. La végétalisation des villes est un enjeu majeur pour notre société actuelle et future. Le point de départ est trivial : il faut des plantes. Lesquelles ? Et ensuite ? Construire durablement demande de pousser au maximum les limites des systèmes.

S’inspirer du fonctionnement de la nature et de sa composition

Il existe sur Terre plus de 7,5 millions d’espèces dont certaines vivent par dizaines de milliers en interaction constante et continue dans des conditions environnementales variées. Ces écosystèmes en équilibre sont riches et leurs fonctionnements influencent d’autres écosystèmes mais également toute une série de conditions environnementales (le sol, le climat, les concentrations en certains gaz, etc.) à petite et grande échelles.

Ce monde vivant existe partout et ces interactions produisent des effets positifs sur notre environnement. Ces bénéfices apportés par la nature sont classés en plusieurs services écosystémiques et sont évalués par un consensus international : The Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services (IPBES).

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Cependant, le récent rapport IPBES met en avant le fait que la nature et ses contributions vitales aux populations, qui ensemble constituent la biodiversité et les fonctions et services écosystémiques, se détériorent dans le monde entier. Ce n’est donc pas uniquement dans une vision technologique qu’il est nécessaire d’apporter de la nature en ville, mais c’est bien vital.

L’analogie entre les conditions environnementales de la ville et de certains milieux naturels

A première vue, la ville est un environnement peu accueillant pour la biodiversité, elle présente pourtant quelques similitudes avec certains milieux naturels. Les amplitudes de températures sont grandes, il fait sec, le sol est minéralisé. Tous ces facteurs peuvent être présents dans certains milieux naturels qualifiés de méso-xérophiles, c’est-à-dire à tendance sec, chaud et minéral. En Belgique, on retrouve des falaises mosanes, des sous-bois secs ou les pelouses sèches.

C’est ce concept que l’équipe de Grégory Mahy a choisi de mettre au centre de ses recherches et de ses projets. Les deux exemples développés ci-dessous sont basés sur ce concept inspirant pour la végétalisation horizontale et verticale de nos villes.

Des toitures végétales diversifiées pour mieux tamponner les flux d’eau

C’est sans doute la conséquence la plus visible du changement global. Les phénomènes extrêmes se succèdent. Sécheresses et inondations s’imposent presque comme un rendez-vous saisonnier dans nos régions. Les indicateurs s’emballent, notamment en 2021 avec un rapport de l’IRM sur une année qualifiée la plus humide depuis 1833.

Lucie Rivière est doctorante en Biodiversité et Paysage. Elle fait partie d’une équipe de trois doctorants et trois professeurs – City Roof – qui travaillent sur l’amélioration des toitures végétales. Lucie se concentre sur l’étude de la capacité de ces toitures à supporter la biodiversité locale et à réguler les flux d’eau venant des précipitations. Elle est la spécialiste des relations plante-sol dans cette équipe et sa mission consiste à déterminer si les espèces végétales choisies ont un rôle déterminant dans le design des toitures végétales durables.

Est-ce que des espèces végétales de nos milieux naturels belges sont capables de mieux retenir l’eau ? Et si oui, quelles sont les quantités par mètre carré ? Des associations d’espèces sont-elles plus efficaces que d’autres ?

Toutes ces questions guident la recherche de Lucie qui expérimente en microtoitures, mini et réel afin de partir du plus simple modèle vers le plus compliqué en contrôlant les inconnues : la pluie, par exemple. Les teneurs en eau du substrat sont mesurées via des capteurs d’humidité haute précision afin de suivre les conditions des toitures végétales en parallèle de la météo et de la performance des plantes.

Plus de 800 plantes ont été plantées et sont actuellement étudiées par Lucie. Pas moins de 140 m² de toitures végétales sont suivis et permettent de sensibiliser le personnel et les visiteurs aux recherches. En effet, la perception de ces toitures, aux allures plus sauvages que celles traditionnellement établies, est souvent plutôt négative. Cependant, c’est la communication de leur intérêt qui change énormément la manière dont le public les perçoit.

Des murs végétaux durables fait de briques pour reconnecter les villes à la nature

Les villes accueilleront près de 70% de la population mondiale en 2050. En densifiant les centres urbains, l’espace au sol manquera. Seraient alors créés des arènes de béton infranchissables pour les êtres vivants autres que les humains. A l’inverse des toitures, les murs peuvent offrir jusqu’à deux fois la surface disponible pour la végétalisation.

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Les murs végétaux représentent dès lors une opportunité hors sol pour contribuer de manière significative à la biodiversité urbaine en ayant aussi un rôle bénéfique pour les citadins. Outre les effets déjà identifiés sur l’isolation des bâtiments, ils offrent des espaces de verdure et de fraicheur non négligeables pour le bien-être des habitants.

Derrière ces avantages incontestables se cachent souvent une uniformisation des choix des végétaux qui sont en plus exotiques. Les conséquences sont directes pour l’environnement et la biodiversité. Il est de ce fait nécessaire de fertiliser, d’apporter des quantités d’eau importantes et souvent de remplacer les espèces qui peinent à s’adapter au contexte climatique. De plus, certaines espèces exotiques ne font que produire des feuilles et donc ont peu d’intérêt en terme de ressources.

Sylvain Boisson est chercheur First Spin Off pour le projet MURVERT ayant pour but de créer une startup universitaire dans le domaine de la biodiversité et du bâti. Ces deux dernières années, les journées ont été animées par la création d’un prototype de mur végétal durable. L’idée était de se focaliser sur un système simple, efficace et durable pour végétaliser les surfaces verticales des bâtiments. En plus, l’intérêt est de contribuer à l’économie de la région et d’utiliser des espèces végétales locales peu demandeuses en termes de ressources.

Les modules contiennent en parties des briques broyées venant de centres de recyclage. Le plus grand enjeu est d’obtenir un produit fiable à coût raisonnable pour être compétitif sur ce marché encore embryonnaire. Après plusieurs tests, un démonstrateur a vu le jour sur un des bâtiments du Campus de Gembloux-Agro Bio Tech. L’expérience de ces deux années a montré qu’il n’est pas nécessaire de mettre en place systématiquement de grande structures pour avoir un impact positif sur la biodiversité. Et les idées continuent d’affluer pour développer de nouveaux types de surfaces verticales hors sol à déployer dans d’autres espaces.

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